
Bien qu’il vive dans la rue depuis juin, François (nom fictif) tient un discours qui peut en surprendre plusieurs.
« J’aime la personne que je suis même si je vis dans la rue », lance avec un sourire candide l’homme de 43 ans.
« Si je me jugeais [d’être dans la rue], je passerais mon temps à me geler », ajoute-t-il.
Lorsqu’on lui demande comment a-t-il fait pour ne plus avoir de toit au-dessus de sa tête, il répond qu’il « a fait de très mauvais choix ».
Et, qu’il n’a jamais su gérer un budget pour réussir à payer ses comptes et son loyer à temps.
« Je ne blâme pas personne », se désole celui qui était mécanicien de vélo. Depuis plus d’un an maintenant, de graves problèmes de dos l’empêchent de travailler.
Ça joue dur
François l’avoue. Ça joue parfois dur dans la rue. Très dur.
Quelques jours plus tôt, à la suite d’une altercation qu’il croyait terminée avec une personne qui a croisé sa route. Cette dernière l’a poussé face à un mur alors qu’il était en train de se pencher pour ramasser son sac à dos.
Sa tête est allée frapper violemment le mur de briques qui se trouvait devant lui, lui ouvrant la tête de quelques centimètres.
« Ce n’est rien ça ! Regarde mes dents ! », ajoute-t-il en montrant celles-ci, ou du moins, celles qui lui restent dans la bouche.
Quelques jours avant cette entrevue, alors qu’il errait à l’extérieur de la Place Rita St-Pierre à Victoriaville, une personne qui semblait être en état de crise l’a frappé au visage.
Légèrement honteux, François a reconnu qu’il lui avait dit de se taire… sans trop de tact.
Jamais au même endroit
C’est par hasard que monvicto.com a croisé le quadragénaire quelques minutes après la conférence de presse annonçant la Nuit des sans-abris.
Celui-ci se reposait sur la table à pique-nique à l’extérieur de la Place Rita St-Pierre.
« Pour ne pas me faire achaler, je ne reste jamais longtemps au même endroit. Je préfère me tenir aux endroits où il n’y a pas de monde ».
Et, qu’en est-il des policiers qu’il croise sur sa route alors qu’il dort à des endroits où il ne devrait pas tomber dans les bras de Morphée ?
« D’habitude ils me laissent tranquille, sauf si une personne a fait une plainte. Quand ça l’arrive, ils me disent de partir ou me suggèrent d’aller au parc Terre-des-Jeunes », répond-t-il.
Sinon, il passe parfois du temps chez Répit jeunesse, un organisme qui vient en aide aux jeunes et aux adultes en difficulté.
« Je me sens en sécurité à cet endroit et je sais qu’on m’y accepte comme je suis. Sans me juger… »
« Je veux m’en sortir »
Au moment de l’entrevue, François était en attente de savoir s’il avait une place chez Domrémy, un centre de traitement des dépendances à Drummondville.
Il attendait aussi une place à la Maison le réverbère, un hébergement temporaire à Victoriaville pour les personnes qui vivent de façon transitoire une situation de crise psychosociale sans toutefois être en situation d’urgence psychiatrique.
« Je veux m’en sortir », conclut-il sans hésiter en terminant l’entrevue.